Voici les quatre derniers inconnus du cimetière de Charonne dont le conservateur Dupré et le commissaire Lechartier nous donnent l’identité (voir l’article précédent).

Jean Bastide.

Né le 27 septembre 1823 à Aurillac. J’ajoute que son père était couvreur et ne savait pas signer son nom — mais c’était il y a longtemps. Pour la même raison, il n’est pas étonnant que Jean Bastide n’ait pas laissé de trace de naissances dans les tables décennales de son arrondissement, le 5e. Il habitait en effet 38 rue de la Montagne-Sainte-Geneviève, était ébéniste et capitaine de la 6e compagnie du 151e. Le commissaire a consulté sa carte de garde national et une liste d’officiers. Il a mis cinq pièces sous scellés.

Étienne Coumergat.

Né le 12 novembre (en fait le 21) 1843 à Clatre-Langin, écrit le commissaire, il s’agit de La Châtre-L’Anglin (orthographe des archives départementales de l’Indre). C’est (donc) dans l’Indre, pas loin de La Souterraine, pas dans la Creuse certes mais pas très loin, et c’est un fils de maçon, né en automne en l’absence de son père, et c’est sa grand-mère (paternelle) qui a déclaré sa naissance. Le commissaire ne connaissait pas sa profession, et moi non plus, puisque son nom n’apparaît pas dans les tables décennales de son arrondissement, le 17e. En effet, il habitait 54 rue des Acacias et appartenait à la quatrième compagnie du 91e bataillon. Où il portait le matricule 414. Le commissaire a utilisé son livret de garde national.

Pierre Legall.

Sur cet ouvrier mécanicien, nous ne savons presque rien, même pas sa date ou son lieu de naissance. La traditionnelle aide de l’état civil nous fait grand défaut. Contentons-nous du fait qu’il a travaillé à Amiens en 1858, n’est donc pas tout jeune, qu’il a habité 38 rue de la Roquette (et ne semble pas avoir déclaré de naissance d’enfant dans le onzième depuis 1860), et qu’il a travaillé « chez Lepage », 26 rue du faubourg-du-Temple — il y avait bien un « Lepage, mécanicien » à cette adresse, mais je n’en sais pas plus. Le commissaire a utilisé un « Certificat », sans plus de précision, et une carte d’alimentation. Il n’est pas question de bataillon. Il est possible que Pierre Legall ait eu plus de quarante ans et n’ait pas été incorporé dans la garde nationale. Il est possible aussi qu’il ait été tué « par hasard », ou parce qu’il avait « une mine d’insurgé ».

Adolphe Gauffinet.

24 ans, né à Dijon, dit le commissaire. Précisément le 12 octobre 1847. Adolphe Gauffinet est le fils d’une ouvrière (sans plus de précision) célibataire de 27 ans, Marguerite Gauffinet, son père n’est pas nommé et c’est une sage femme qui a déclaré sa naissance. Le 16 juillet 1864 (il n’avait pas encore 17 ans), il était déjà à Paris et habitait 294 rue Saint-Jacques. Il a travaillé, du 8 février 1870 au 1er mai 1871 chez Lectret, un limonadier du quai des Célestins, et auparavant, ajoute le commissaire, chez Beiras, 20 rue des Gravilliers — il y avait bien un limonadier à cette adresse mais l’annuaire Didot-Bottin le nomme (de 1864 à 1871) Odin. Le document mentionné par le commissaire est un livret (sans doute d’ouvrier) visé le 2 mai 1871 par le commissariat de police du quartier Saint-Gervais (dont dépend le quai des Célestins). Il n’est pas question non plus de bataillon, mais, vu son âge Alphonse Gauffinet était sans doute garde national. Je n’en sais pas plus.

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Voilà, j’en ai fini avec l’agitation autour de l’exhumation du banquier Jecker. Si vous avez des renseignements sur ces sept « un peu moins inconnus », n’hésitez pas à m’écrire!

Quant à la plaque du cimetière de Charonne, c’est une vieille photographie que j’ai déjà utilisée plusieurs fois (et pour la première fois, là).