Comme je l’ai dit dans un des articles précédents, je vais parler de ce que font les Sarthois — en tant que Sarthois — à Paris pendant la Commune. Des choses très semblables pourraient bien sûr être dites des Parisiens nés dans tel ou tel autre département.
Comme je l’ai dit aussi, il ne s’agit pas simplement de Parisiens « d’origine sarthoise », mais bien de Parisiens nés dans la Sarthe et donc qui, le plus souvent, y ont encore de la famille.
Dans la Sarthe même, il y a eu peu de mouvement. Peut-être un tout petit peu quand même. Au Mans, des « communeux » (selon L’Union de la Sarthe) ont affiché sur la préfecture un placard qui traite les préfets et Thiers de chouans et de traîtres.
Mais à Paris?
Souvenons-nous que Versailles a instauré un authentique blocus sur les nouvelles de Paris et que, dans la Sarthe comme dans tout le pays, on sait assez mal ce qui s’y passe. Même si le journal L’Union de la Sarthe dit le contraire, prétendant que
Les journaux honnêtes de Paris et de Versailles ne nous arrivent que difficilement.
Et, sur place, que
Heureusement, les éléments turbulents et sanguinaires ne s’y montrent pas, et la loyale et honnête population est insensible à tout appel de désordre venant de Paris.
(cité par Le Gaulois du 4 mai 1871).
Car, en effet, de tels appels existent: à Paris, on essaie de se rassembler pour tenter d’aller convaincre la population des départements de soutenir la Commune.
Pour ce qui nous concerne ici, c’est-à-dire le département de la Sarthe, j’ai relevé dans la presse des réunions des
habitants originaires de Maine-et-Loire, de Mayenne et de Sarthe
à 8 heures à l’école Turgot les 2 mai, 9 mai, 13 mai, 16 mai. Mais il s’agit d’une petite facette d’une énorme activité. Je vous offre deux petites citations de Comme une rivière bleue:
Mardi 2 mai
[..]
Huit heures. Les républicains de l’Indre se réunissent 3 avenue Victoria: ceux du Maine-et-Loire, de la Mayenne et de la Sarthe à l’école Turgot; ceux de l’Aisne aussi, de même que les Normands; et ceux du Rhône au Conservatoire des arts et métiers.
Soirée. Canonnade intense sur Asnières.
Mercredi 3 mai
[…]
Sept heures et demie. Les Jurassiens se retrouvent rue Volta, contre la petite échoppe ancienne. Toutes ces réunions ont été annoncées dans les journaux, avec de nombreuses autres, des ouvriers selon leurs occupations, selliers ici, maçons ou tailleurs ailleurs, chaudronniers là, femmes ici ou là, les sections de l’Association internationale des travailleurs, les artistes lyriques, tous éprouvent le besoin de se retrouver, alors tout le monde court à une réunion, les citoyens de l’Oise, ceux du Loiret […], ceux d tl ou tel autre département…
Huit heures. Dans la salle de l’école communale, au numéro 5 de la rue Jean-Lantier, dans le premier arrondissement, se tient une réunion des citoyens de la Nièvre […]
etc., etc.
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J’ai consulté la presse et aussi relu mon livre
Audin (Michèle), Comme une rivière bleue, L’arbalète-Gallimard (2017).
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L’image est extraite d’une carte de l’arrondissement de Saint-Calais (capitale mondiale du chausson aux pommes) datant de 1853 (que j’ai trouvée sur Gallica).