Le 16 avril, à trois heures et quart s’ouvre une séance de la Commune de Paris. C’est Arthur Arnould qui la préside. Elle dure jusqu’à sept heures moins le quart. Le dernier point à l’ordre du jour est une proposition « présentée par le citoyen Avrial et plusieurs de ses collègues ». C’est un projet de décret. Il est mis aux voix et « adopté en principe ».

Le procès-verbal de la réunion se trouve ici.

Voici ce décret.

Décret portant organisation d’une commission d’enquête pour établir la statistique des ateliers abandonnés:

La Commune de Paris,

Considérant qu’une quantité d’ateliers ont été abandonnés par ceux qui les dirigeaient afin d’échapper aux obligations civiques, et sans tenir compte des intérêts des travailleurs;

Considérant que par ce lâche abandon de nombreux travaux essentiels à la vie communale se trouvent interrompus, l’existence des travailleurs compromise;

Décrète:

Les chambres syndicales ouvrières sont convoquées à l’effet d’instituer une commission d’enquête ayant pour but:

1° De dresser une statistique des ateliers abandonnés, ainsi qu’un inventaire exact de l’état dans lequel ils se trouvent et des instruments de travail qu’ils renferment;

2° De présenter un rapport établissant les conditions pratiques de la prompte mise en exploitation de ces ateliers, non plus par les déserteurs qui les ont abandonnés, mais par l’association coopérative des travailleurs qui y étaient employés;

3° D’établir un projet de constitution de ces sociétés coopératives ouvrières;

4° De constituer un jury arbitral, qui devra statuer, au retour desdits patrons, sur les conditions de la cession définitive des ateliers aux sociétés ouvrières et sur la quotité de l’indemnité qu’auront à payer les sociétés aux patrons.

Cette commission d’enquête devra adresser son rapport à la Commission communale du travail et de l’échange, qui sera tenue de présenter à la Commune, dans le plus bref délai, le projet de décret donnant satisfaction aux intérêts de la Commune et des travailleurs.

Sans doute ce décret, qui appelait quelques explications, qui peut-être nécessitait quelques décrets latéraux, comme dit Lissagaray, n’était-il pas applicable à l’heure de la bataille. Il ne fut d’ailleurs pratiquement appliqué nulle part.

On notera qu’il avait gentiment prévu l’indemnisation des patrons…

Il donne quand même une idée des revendications ouvrières et du travail qu’accomplissait la Commission du Travail et de l’échange. C’est une idée nouvelle et qui a encore du chemin à faire: on peut produire sans les patrons.

La Commission du Travail et de l’échange était composée, sous la houlette du délégué Leo Frankel, d’internationalistes — socialistes révolutionnaires.