Choisi par Emmanuel Macron en personne, qui s’est désigné comme notre Thiers à nous, voici notre Galliffet à nous, le préfet de police Didier Lallement, nommé « en pleine crise des gilets jaunes », comme dit Le Monde, et qui, parmi tant de modèles historiques a négligé le plus illustre de ses prédécesseurs, Maurice Papon, pour lui préférer le Marquis aux semelles sanglantes,

Pour se prendre pour Jules Vallès, il faut avoir son Galliffet

aurait-il déclaré. La culture étonne…

Pour mémoire, et parmi tant d’autres, une citation d’un autre siècle:

Le 26 mai dernier [1871, naturellement] nous faisons partie de la colonne de prisonniers partie du boulevard Malesherbes à huit heures du matin, se dirigeant sur Versailles. Nous nous sommes arrêtés au château de la Muette où le général Galliffet, après être descendu de cheval, est passé dans nos rangs, et là faisant un choix et désignant à la troupe quatre-vingt-trois hommes et trois femmes, ils furent amenés sur les talus et fusillés devant nous. Après cet exploit le général nous dit : Je me nomme Galliffet. Vos journaux de Paris m’ont assez sali, je prends ma revanche.

De là nous fûmes dirigés sur Versailles, où, pendant le trajet, nous eûmes encore à assister à de terribles exécutions faites sur la personne de deux femmes et de trois hommes qui, tombant épuisés et ne pouvant suivre la colonne, furent tués à coups de baïonnette par les sergents de ville formant notre escorte.

Ce texte, signé par onze « témoins oculaires », vient du Livre rouge de la justice rurale, de Jules Guesde.

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Un article paru dans Le Monde en ligne le 23 février 2020 (il est possible que vous ne puissiez pas le lire entièrement si vous n’êtes pas abonnés, essayez là) m’a forcée à écrire le présent article. L’image de couverture est un portrait du massacreur de la Commune par Steinlen. Le livre cité est:

Guesde (Jules), Le Livre rouge de la justice rurale, Genève, Blanchard (1871).