Pas vraiment parce qu’elle est sarthoise, même si j’inclus cet article dans cette série « Communards sarthois » (qu’enfin ici on peut mettre au féminin).
La première raison, c’est qu’elle nous offre le seul témoignage connu sur la guerre versaillaise. Cette guerre commence dès le 2 avril et est, même avant la Semaine sanglante, extrêmement meurtrière. Alix Payen seule raconte, au jour le jour, comment vit un bataillon de la garde nationale sous le feu versaillais, les batailles, les morts et les blessés, mais aussi la vie quotidienne dans ce groupe — le bataillon de son quartier. Il y a peu d’autres textes, bien sûr il y a celui de Victorine Brocher, mais il n’a rien d’un témoignage: ce sont des souvenirs, écrits bien longtemps après les faits…
Alix Payen est aussi la seule ambulancière participant à la guerre à avoir écrit: Victorine Brocher était cantinière et… Louise Michel ni l’une ni l’autre. Je me permets de rappeler aussi que Geneviève Bréton a elle aussi été ambulancière, mais dans une ambulance parisienne, sans participer du tout à la guerre.
La deuxième raison, c’est qu’Alix Payen se trouve en dehors de tous les stéréotypes de tous les historiens (de tous bords). C’est certainement une des raisons pour lesquelles son témoignage, publié par Charles Péguy avant la première guerre mondiale puis oublié, publié par François Maspero au cours des années 1970 puis oublié… n’est réapparu que ces dernières années. En espérant que ce texte ne sera pas re-découvert, après un nouvel oubli, dans 50 ans…
Une femme communarde, ce doit être une ouvrière, de préférence militante de l’Association internationale des travailleurs et/ou de l’Union des femmes pour la défense de Paris et les soins aux blessés, ce peut être une journaliste, si on peut lui associer un homme (« la femme de… ») ou une institutrice (même si elle n’a pas d’homme, les historiens aiment bien les « vierges », surtout rouges).
Ce n’est certes pas le cas d’Alix Payen, qui est une bourgeoise, certes mariée mais son mari n’est pas connu (d’ailleurs il est tué par cette guerre), et qui ne coche aucune des cases.
Elle ajoute à ceci l’influence fouriériste dont elle a bénéficié dans sa famille et son éducation.
Elle ajoute ainsi à la diversité des communards et des communardes. À laquelle je tiens.
Et puis, la dernière raison, c’est son exceptionnel talent d’écrivaine. J’y tiens aussi beaucoup!
Livres cités
Mémoires de femmes mémoire du peuple, Anthologie réunie par Louis Constant, Petite collection Maspero (1978).
Payen (Alix), C’est la nuit surtout que le combat devient furieux Une ambulancière de la Commune, Écrits rassemblés et présentés par Michèle Audin, Libertalia (2020).
Brocher (Victorine), Souvenirs d’une morte vivante, A. Lapie (1909), — Souvenirs d’une morte vivante Une femme dans la Commune de 1871, Libertalia (2017).
Bréton (Geneviève), Journal 1867-1871, Ramsay (1985).