Un délicat « livre noir » déjà cité écrit que Blanqui est absent de Paris le 18 mars

pour cause de danger.

D’emprisonnement, plutôt! Un des plus beaux coups réalisés par Thiers, ce fut de faire arrêter « le » révolutionnaire, Auguste Blanqui, le 17 mars, près de Figeac où il se reposait chez sa nièce, pour l’affaire du 31 octobre.

Une infamie du même genre fut proférée par l’officiel rapporteur de l’officielle Commission d’enquête parlementaire sur l’insurrection du 18 mars: l’affaire du 31 mars jugée,

Flourens, qui avait repris son costume de major général, se promenait tout galonné d’or au milieu des bataillons de Montmartre et de Belleville; Blanqui, plus prudent, se contentait d’écrire.

Toujours est-il que Blanqui, qui portait déjà le surnom de « l’Enfermé », à cause des nombreuses années qu’il avait passées en prison, s’est retrouvé dans la prison de Cahors et n’a pas participé à la Commune de Paris.
Le 17 mars… Il n’est donc pas vrai, comme on peut le lire sous la plume respectable de Louis Dubreuilh, que c’est le 19 mars, en représailles du 18 mars, que Thiers a fait arrêter Blanqui. L’arrestation du « Vieux » faisait partie du même dessein politique que le 18 mars, mais c’est bien le 17 qu’elle a eu lieu.

Voir, au besoin, la chronologie.

En anticipant un peu. Blanqui a pourtant été élu à la Commune par le vingtième arrondissement. Mais, non, il n’était pas présent place de l’Hôtel de Ville lors de la proclamation de la Commune le 28 mars, comme semblent le croire les personnages de la magnifique bédé Le Cri du peuple.

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Auguste Blanqui est né le 8 février 1805. Il a été « le » révolutionnaire. Il était un théoricien plutôt de la prise du pouvoir que de la révolution socialiste. Il a participé à toutes les révolutions du dix-neuvième siècle en France — sauf à la Commune elle-même puisqu’il avait été arrêté le 17 mars (et emprisonné au secret). Il fut candidat socialiste révolutionnaire aux élections législatives de février 1871. Bien qu’extrêmement populaire, il n’obtint que 52 839 voix et ne fut pas élu. Beaucoup de communards, dits « blanquistes » se réclamaient de lui. Il fut d’ailleurs élu membre de la Commune par plusieurs arrondissements.

La Commune essaya en vain de l’échanger contre l’archevêque Darboy et d’autres otages.

Après Cahors, il fut emprisonné au fort du Taureau (Morlaix), puis à Versailles, avant de passer devant un Conseil de guerre les 15 et 16 février 1872 — comme « inspirateur » de la Commune! Seule sa mauvaise santé lui évita la déportation en Nouvelle-Calédonie.

Il a passé, au total trente-six années de sa vie en prison, d’où son surnom de « l’Enfermé ». Il était aussi, affectueusement et respectueusement, nommé « le Vieux ».

Il fut élu député de Bordeaux en 1879, alors qu’il était inéligible…  Il fut libéré. Il est le créateur de la devise « Ni Dieu, ni maître! », titre du dernier journal qu’il créa.

Grâce à l’amnistie des communards, Louise Michel put revenir de Nouvelle-Calédonie à temps pour prononcer son éloge funèbre le 5 janvier 1881.

Tombe d'Auguste Blanqui au Père Lachaise (photo MA)
Tombe d’Auguste Blanqui au Père Lachaise (photo MA)

(à suivre)

Livres cités

O’Nyme (Anne)Livre noir de la Commune, Office de publicité (1871).

Enquête parlementaire sur l’insurrection du 18 mars, Versailles, Cerf (1872).

Dubreuilh (Louis), La Commune, in Histoire Socialiste, dirigée par Jean Jaurès, Paris, Jules Rouff (1901).

 Tardi (Jacques) et Vautrain (Jean), Le Cri du peuple, Casterman (2001-2004).