Aujourd’hui encore je vous renseigne sur l’actualité du jour grâce à l’aide des notes d’Adolphe Michel.

Commençons par un décret gouvernemental, paru dans le Journal officiel  de demain 12 janvier (dans cet article les citations sont en vert):

Paris, le 11 Janvier 1871.

Le Gouvernement de la défense nationale,

Considérant que les devoirs de la République sont les mêmes à l’égard des victimes du bombardement de Paris qu’à l’égard de ceux qui succombent les armes à la main pour la défense de la patrie,
Décrète: Tout Français atteint par les bombes prussiennes est assimilé au soldat frappé par l’ennemi. Les veuves de ceux qui auront péri par l’effet du bombardement de Paris, les orphelins de pères ou de mères qui auront péri de même, sont assimilés aux veuves et aux orphelins des soldats tués à l’ennemi.

Fait à Paris, le 11 janvier 1871.
GÉNÉRAL TROCHU, JULES FAVRE, JULES FERRY, JULES SIMON,
EUGÈNE PELLETAN, EMM. ARAGO, GARNIER-PAGÈS, ERNEST PICARD.

Une tradition de victimes civiles considérées comme des soldats s’instaure, qui donnera naissance, une guerre plus tard, à la mention d’état civil « Mort pour la France ».

En effet, dans la nuit du 10 au 11 janvier, le bombardement a été très intense sur la rive gauche, nota Adolphe Michel, et plus précisément

Les obus ont principalement atteint les quartiers des Invalides, du Panthéon, de Saint-Sulpice, de la Sorbonne, du Jardin-des-Plantes. Ceux de Vaugirard et de Grenelle en ont été littéralement criblés, ainsi que le constate le rapport des guetteurs de nuit (postes des Invalides) qui ont compté, de neuf heures du soir à trois heures du matin, trois cent trente-sept coups tirés par les batteries prussiennes, quatre-vingt-neuf obus ayant éclaté sur Vaugirard, trente-huit sur Grenelle et le faubourg Saint-Germain, jusqu’au haut du quartier Mouffetard. Les objectifs semblaient être le palais du Luxembourg, le Panthéon et le Val-de-Grâce, en raison du grand nombre de projectiles tombés dans le jardin (vingt-trois obus) et dans les rues avoisinantes de Fleurus, de Madame, d’Enfer, de l’Écote-de-Médecine, du Val-de-Grâce, des Feuillantines.

Les édifices atteints sont l’École polytechnique, l’École pratique de médecine, le couvent du Sacré-Cœur, l’hospice de la Salpêtrière, le bâtiment principal de l’Assistance publique, l’usine Cail, la maison du docteur Blanche. Enfin huit incendies se sont déclarés, et cinquante propriétés particulières ont été plus moins sérieusement dégradées.

Du côté militaire, voici, toujours dans le Journal officiel daté du 12 janvier:

RAPPORT MILITAIRE

11 janvier, soir.

Pendant la nuit, l’ennemi a continué à bombarder Paris. Comme les jours précédents, nous n’avons eu que peu de blessés. Quant aux dégâts matériels, ils sont presque insignifiants. Aucun incendie ne s’est déclaré.
Dans la journée, le feu a repris avec une violence extrême contre les forts du sud, principalement contre le fort d’Issy, qui paraît être le principal objectif des batteries prussiennes. Des dispositifs considérables d’artillerie sont en voie d’exécution pour combattre efficacement les nouvelles batteries démasquées par l’ennemi.
Du côté des Hautes-Bruyères, du Moulin-Saquet et de Créteil. canonnade peu importante et sans résultat.

Le Gouverneur de Paris,
P. O. Le général chef d’état-major général, SCHMITZ.

Pour copie conforme:
Le ministre de l’intérieur par intérim,
JULES FAVRE.

La guerre que bientôt un gouvernement français installé à Versailles va mener contre Paris le redémontrera, le fort d’Issy est la clef de l’accès à Paris depuis Versailles… où, en ce mois de janvier ce sont les Prussiens qui sont installés (voir notamment notre article du 18 janvier).

*

L’image de couverture, parue dans Le Monde illustré daté du 14 janvier, représente l’intérieur d’une chambre de la rue des Feuillantines atteint par un des premiers obus prussiens, quelques jours plus tôt (et précisément le 5 janvier à deux heures et demie « du soir » (de l’après-midi)).

Livre utilisé

Michel (Adolphe), Le siège de Paris, 1870-1871, A. Courcier (1871).

Cet article a été préparé en septembre 2020.