La tâche que je me suis fixée pour ce site dans les prochains mois sera de suivre, jour après jour, l’actualité de 1869-70, avant la Commune, donc, à travers une lecture quotidienne de La Marseillaise.

On le verra, des grèves de mineurs, au Creuzot (orthographe de l’époque) notamment, prendront une grande place dans cette actualité.

Les mines de charbon, associées aux « forges » — c’est-à-dire à la sidérurgie — sont un des moteurs essentiels de ce que l’on appelle « la révolution industrielle », qui est aussi le capitalisme. Il faut beaucoup d’acier, pour construire les voies ferrées et les trains, par exemple.

En cette fin du second empire, le pouvoir politique des « maîtres de forges » — les patrons de la sidérurgie — est à la mesure de leur pouvoir économique. Un exemple typique: Eugène Schneider (prononcer « chnèdre »), le grand patron du Creuzot, fut aussi le président du « Corps législatif », l’assemblée de l’époque (qui n’avait aucun titre à s’appeler « nationale »).

Logiquement, les grands complexes sidérurgiques, comme ceux de Saint-Étienne ou du Creuzot, sont aussi des lieux où le mouvement ouvrier commença à s’organiser. Nous verrons l’Association internationale des travailleurs tenter de s’y implanter.

Avant d’en arriver là, on peut se demander quelle image on pouvait, à cette époque, se faire de la mine, du travail qui s’y faisait et des conditions dans lesquelles il se faisait.

Il existe un beau livre, bien illustré, et même bien numérisé par Gallica, La Vie souterraine, ou les mines et les mineurs, daté de 1867 (au moins). Disons que le travail des mineurs y est vu à travers les lunettes roses de l’ingénieur…

De ce livre est extraite la carte mise en couverture de cet article et que je reproduis ici (on peut cliquer pour agrandir).

On a vu qu’en 1869, le mineur, comme le mécanicien conduisant sa locomotive, était une des figures du « peuple » vu par Jules Vallès. Je l’ai alors signalé, et je le rappelle, les images légendaires telles celles de Germinal, étaient encore dans les limbes. Il se trouve que Jules Vallès est, justement, descendu dans une mine, dès 1866, dans le bassin de Saint-Étienne.

Je vais donc reproduire les deux articles qu’il a tirés de cette expérience et qui seront les deux prochains articles sur ce site. On y remarquera peut-être que l’auteur n’en est pas encore tout à fait au « peuple »: il est plus impressionné par la descente et la mine que par les ouvriers qui y travaillent.

Avant les grandes grèves du Creuzot en 1870, avant leur répression, disons, féroce, il y a eu celles de La Ricamarie (toujours le bassin de Saint-Étienne) et d’Aubin (bassin de Decazeville). « Celles »: grève et répression. Ici, pour la première fois de façon aussi massive, le rôle de police est dévolu à l’armée, de beaux débuts, un bel avenir… La Ricamarie, juin 1869, quatorze morts dont un bébé. Aubin, octobre 1869, quatorze morts également.

Après les deux articles de Vallès, l’article suivant sera consacré à l’histoire de la fusillade de La Ricamarie. Celle d’Aubin attendra que La Marseillaise y envoie un journaliste, Achille Dubuc… qui se préoccupera, outre de la mine, des conditions de la vie des mineurs.

Livres cités

Simonin (Louis-Laurent), La Vie souterraine, ou Les mines et les mineurs, Hachette (1867).

Zola (Émile), Germinal, Hetzel (1885).