Il y aura, en janvier, « l’Affiche rouge », il y a eu, le 15 septembre, « la première affiche rouge« . Et puis il y a celle-là, dont je n’ai trouvé que cette vilaine reproduction. La réunion de l’Alcazar, dont elle résume les résolutions, a fait l’objet d’un compte rendu publié par Le Rappel daté du 22 septembre. Il y a aussi un procès verbal dans le livre de Dautry et Scheler. J’insère en rouge certaines des informations de ce procès verbal dans le texte du Rappel.
COMITÉ CENTRAL RÉPUBLICAIN
DE DÉFENSE NATIONALE
Des vingt arrondissements de Paris
Les délégués des vingt comités d’arrondissement de Paris se sont réunis hier, 20 septembre 1870, au nombre de 230 [au début de la réunion, à 10 h 1/2, ils étaient 157, au dernier appel, 230 ont répondu], à la salle de l’Alcazar, Le bureau, sous la présidence du citoyen Lefrançais [Johannard, assesseur, Hamet et Lévy, élus secrétaires], a vérifié les pouvoirs de ces délégués. Ils ont été reconnus réguliers.
[Informations ont été données d’une réunion des maires, le gouvenement leur aurait assuré qu’il ne traiterait pas tant que les Prussiens seraient sur le territoire. Duval a proposé de réunir le comité aux chefs de bataillon actuellement réunis.]
Après une discussion à laquelle ont pris part les citoyens Longuet, Vallès [il dit qu’il y a au gouvernement provisoire deux hommes qui seront opposés à la paix, Rochefort et Emmanuel Arago, il doute que ce soit assez], Ranvier [pas tout à fait de l’avis de constituer la Commune, la question est de sauver la nation et de se garer contre le bruit de paix], Grenier, Vertut, Leverdays, Chemalé [qui aimerait savoir ce qu’ont dit les chefs de bataillons], etc. [Le citoyen Mallet a proposé d’aller demander au gouvernement provisoire de s’adjoindre des membres connus du peuple, tel Blanqui, une proposition mal accueillie.], les résolutions suivantes, proposées par le citoyen Chassin, ont été adoptées, à l’unanimité, pour les quatre premières, et à la majorité des voix pour la dernière.
I. La République ne peut pas traiter avec l’ennemi qui occupe son territoire.
II. Paris est résolu à s’ensevelir sous les ruines plutôt que de se rendre.
III. La levée en masse sera immédiatement décrétée à Paris et dans les départements, ainsi que la réquisition générale de tout ce qui peut être utilisé pour la défense du pays et la subsistance de ses défenseurs.
IV. La remise immédiate entre les mains de la commune de Paris [je confirme que Le Rappel écrit « commune de Paris » et « Préfecture de police »], de la police municipale; en conséquence, suppression de la Préfecture de police.
V. L’élection rapide des membres de la commune de Paris. Elle se composera d’un conseiller municipal à raison de 10,000 habitants.
Il est arrêté que les résolutions ci-dessus seront portées, par voie d’affichage, à la connaissance de la population de Paris, et qu’elles seront en même temps notifiées au gouvernement provisoire par une commission composée de vingt délégués choisis dans chacun des arrondissements.
Il est encore arrêté par l’assemblée que les citoyens seront invités à veiller en armes à la conservation des affiches.
Les délégués se sont présentés à l’Hôtel de Ville. Reçus par le citoyen Jules Ferry, représentant le gouvernement provisoire, ils lui ont donné lecture des résolutions prises, et l’ont interpellé sur les trois points suivants :
I. Le gouvernement provisoire a-t-il ou non l’intention de traiter avec la Prusse, ainsi que l’indiquent et la circulaire de J. Favre du 19 septembre et l’article d’un journal du 21, article portant pour titre l’Armistice?
À cette question, le citoyen Ferry a donné, tant en son nom qu’en celui du gouvernement, sa parole d’honneur que le gouvernement ne traiterait à aucun prix avec la Prusse, et qu’à la seule énergie de Paris serait confiée la mission de sauver la patrie et la République.
Il. Le gouvernement provisoire accédera-il à la volonté populaire de supprimer la Préfecture de police et de remettre à la commune de Paris le soin d’organiser la police ?
Le citoyen Ferry a répondu qu’il ne pensait pas que le gouvernement eût le pouvoir de faire cette suppression, mais que, d’ailleurs, la municipalité de Paris, une fois constituée, agirait comme elle croirait devoir le faire.
III. Enfin, en ce qui concerne l’élection de la commune de Paris, le citoyen Ferry a répondu qu’il ne pensait pas que les élections puissent être faites avant le 28 septembre. Quant au nombre de membres qui la devront composer, il pourra être augmenté, mais en conservant la reparition égale entre les arrondissements, sans tenir compte de la proportionnalité de leurs habitants.
En présence des observations du citoyen Ferry, relatives à l’élection de la commune de Paris, les délégués ont jugé qu’ils pouvaient lui abandonner ce point, surtout après la réponse si nette, si précise qu’ils avaient reçue quant à l’intention du gouvernement de poursuivre la guerre à outrance.
En foi de quoi les délégués ont signé le présent procès verbal.
Ch. Beslay. — Camélinat. — Ch.-L. Chassin. — E Châtelain. — A. Claris. — Cornu. — E. Dupas. — E. Duval. — Johannard. — P. Lanjalley. — G. Lefrançais. — Ch. Longuet. — L. Michel. — Mollin. — G. Pagnerre. — J.-B. Perrin. — G. Ranvier. — E. Roy, — Toussaint.– Vertut.
*
Le texte a été publié dans le numéro du journal daté du 22, c’est-à-dire paru au matin du 21 septembre. Ceci indique que c’est à dix heures et demie du matin que la réunion du 20 a eu lieu, que les délégués ont été reçus par Ferry dans la même journée, assez tôt pour qu’ils aient eu le temps de rédiger le texte et de le donner le soir au journal.
La Patrie en danger en publie une version abrégée (essentiellement le texte de l’affiche, sans les signataires) le 22. Dans le même numéro, elle rend compte, « aujourd’hui » de la visite de cinquante chefs de bataillons à l’Hôtel de Ville, qui donc a eu lieu le 21 septembre.
Livres cités ou utilisés
Les Murailles politiques françaises, Paris, A. Le Chevallier (1873-1874).
Dautry (Jean) et Scheler (Lucien), Le Comité central républicain des vingt arrondissements de Paris, Éditions sociales (1960).
Cet article a été préparé en mai 2020.
[Ajouté le 8 décembre 2020. Voir aussi la belle et excellente page des archives de Paris sur les cent cinquante ans de la guerre franco-prussienne et plus précisément son article sur le 20 septembre 1870.]