À la une de son numéro daté du 16 mai 1871 (paru le 15, donc), Le Cri du peuple publia le court article non signé que voici.

On nous avait donné, depuis quelques jours, des renseignements de la plus haute gravité dont nous sommes aujourd’hui complètement sûrs.

On a pris toutes les mesures pour qu’il n’entre dans Paris aucun soldat ennemi.

Les forts peuvent être pris l’un après l’autre. Les remparts peuvent tomber. Aucun soldat n’entrera dans Paris.

Si M. Thiers est chimiste, il nous comprendra.

Que l’armée de Versailles sache bien que Paris est décidé à tout plutôt que de se rendre.

Ces quelques phrases furent cause de la condamnation à mort (par contumace) de Jules Vallès (que j’ai déjà mentionnée dans un autre article). Il est parfaitement établi que l’auteur de cet article était Casimir Bouis, même si Vallès a assumé ses responsabilités de rédacteur en chef.

Comme il l’écrivit dans son roman L’Insurgé:

Ce n’est pas moi qui ai écrit cette phrase si chaude. Je l’ai lue ce matin dans l’article d’un collabo. Je l’ai trouvée raide, mais je n’allais pas faire un erratum, sûr!

Pourtant, l’attribution de la phrase

Si M. Thiers est chimiste, il nous comprendra.

à Jules Vallès est encore reproduite dans des ouvrages récents (je l’ai vue dans un livre d’Éric Fournier).

(à suivre)

Livres cités

Vallès (Jules)L’Insurgé, Œuvres, Pléiade, Gallimard (1989).

Fournier (Éric), Paris en ruines Du Paris Haussmannien au Paris communard, Imago (2008).