Lorsque j’ai publié et commenté le cahier d’Albert Theisz sur la semaine sanglante, je me suis concentrée surtout sur le récit qu’il a consacré à l’après-midi du vendredi 25 mai sur le boulevard Voltaire.

Je reviens ici sur ce qui s’est passé à l’Hôtel des postes les 22 et 23 mai.

Albert Theisz avait été nommé directeur général des postes, d’abord par le Comité central puis par la Commune, et avait réussi à réorganiser le service de la poste dans Paris.

L’Hôtel des postes était alors situé rue Jean-Jacques Rousseau, comme on le voit sur le plan (j’utilise toujours le même plan de Paris).

Le lundi 22 mai au matin, après avoir passé une partie de la nuit dans le douzième, Theisz est allé à l’Hôtel de Ville et y a « vu Vermorel ». Ici une ellipse de son texte nous amène au mardi matin à l’Hôtel de Ville.

Je le complète à l’aide du récit d’Émile Lambry, écrit aussitôt après les faits (il est accompagné d’une lettre de Théodore Bonvalet, qui, pas plus que Mottu, n’était redevenu maire de son arrondissement mais, comme Mottu, avait été élu au conseil municipal, datée du 21 août 1871).  Toutes les citations du présent article viennent de la brochure d’Émile Landry.

Le lundi matin, le personnel de l’Hôtel des postes échange les nouvelles, le bâtiment reçoit un obus, égaré parmi ceux que les Versaillais, depuis le pont des Invalides, tiraient sur la redoute Saint-Florentin, place de la Concorde (celui-là sera mentionné dans le tout dernier numéro du Journal Officiel).

Vers dix heures, M. Theisz apparut, ceint de son écharpe de membre de la Commune. Il convoqua tous les agents pour deux heures de l’après-midi, puis il se rendit à la caisse pour vérifier son contenu. Sa préoccupation était toujours la même: payer intégralement tout le monde.

Malgré le fait qu’il n’y a pas assez d’argent dans les caisses…

À deux heures, tout le personnel se réunit dans la salle des facteurs. M. Theisz arriva accompagné de Vermorel.

D’où nous pouvons déduire que Theisz est allé du douzième à l’Hôtel des postes, puis s’est rendu à l’Hôtel de Ville où il a vu Vermorel, qui l’a accompagné à l’Hôtel des postes.

Vermorel monte sur une table et harangue les employés:

« Les Versaillais ont franchi l’enceinte, il faut que chaque citoyen prenne un fusil. À nous d’organiser la défense dans Paris, à vous de vous enfermer dans l’Hôtel des postes et de résister à toute agression. J’ai envoyé chercher des armes et des vivres, dans un instant on donnera un fusil à chacun de vous. »

M. Theisz jugea prudent d’ajouter: « Mais auparavant, passez à la caisse et on vous paiera. »

Le mardi à six heures du matin, les fusils arrivent, les facteurs les prennent et disparaissent avec. La Commune envoie quelques fédérés et des vivres, sans doute avec l’idée de tenir un siège. Deux barricades sont construites,

la première se trouvait au coin de la rue Jean-Jacques et de la rue Montmartre, la seconde au coin de la rue Pagevin et de la rue Coq-Héron.

La bataille des rues commence dans le quartier.

Quand les premiers coups de feu éclatèrent en haut de la rue Montmartre, il y avait en tout vingt-six fédérés pour défendre l’administration. Ces citoyens avaient déjà à plusieurs reprises manifesté l’intention d’incendier l’Hôtel.

Pendant ce temps, Theisz est passé à l’Hôtel de Ville, puis s’est rendu à La Chapelle, s’est battu boulevard Ornano, a été témoin de la blessure mortelle de Dombrowski.

Et puis… il est passé par la rue Montmartre, comme l’indique son récit…

… pour aller à l’Hôtel des postes.

Heureusement, vers neuf heures, M. Theisz arriva. Il avait toujours son écharpe autour des reins. Il conseilla aux fédérés de se replier vers la place du Château-d’Eau, car toute résistance était devenue inutile de ce côté. Les gardes nationaux consentirent à s’échapper, mais ils voulurent préalablement mettre le feu à l’Hôtel.

Theisz s’y est opposé. Il y eut une dispute. Mais les Versaillais se rapprochaient et les fédérés qui voulaient brûler l’Hôtel le quittèrent. Theisz et ceux qui étaient avec lui auraient pu partir en passant

par une maison ayant issue sur la place Saint-Eustache.

Le récit de Theisz reprend le mercredi matin à l’Hôtel de Ville.

Pour ce qui est de l’Hôtel des Postes, tôt le matin du 24 mai (cinq heures selon les uns, sept heures selon d’autres),

un détachement du treizième de ligne montait la Garde devant la porte de l’Hôtel.

Livres utilisés

Lambry (Émile), Les mystères du cabinet noir sous l’Empire et la poste sous la Commune, précédés d’une lettre de Bonvalet, Dentu (1871).

Laurent (Benoît)La Commune de 1871. Les postes, les ballons, le télégraphe, Lucien Dorbon, Paris (1934).